Le lac Powell situé dans l’ouest américain recèle encore bien des trésors dont certains sont accessibles très facilement. Horseshoe Bend est un très beau méandre en forme de fer à cheval (d’où son nom, horseshoe: fer à cheval, bend: courbe) creusé par le fleuve Colorado. Le contraste entre le vert émeraude du fleuve Colorado (qui coule 340 mètres plus bas) et l’orange des falaises est magnifique. L’autre merveille naturelle de la région est le Rainbow Bridge National Monument, le plus large pont naturel au monde découvert en 1909 l’explorateur John Wetherill. D’une hauteur de 88 mètres pour une largeur de 10 mètres, c’est un site sacré pour les indiens Navajos qui l’appellent « Nonnoshoshi » (l’arc-en-ciel changé en pierre) ; il est donc interdit de passer sous le pont…
Enfin, le tour d’horizon serait incomplet sans une visite de la Maison Blanche… Comment la Maison Blanche a été délocalisée depuis Washington ? On a encore glissé dans une nouvelle dimension Mr Quinn Mallory ? Mais non, White House est un endroit tout ce qu’il y a de réel situé dans le Vermillion Cliffs Wilderness Area ! Les roches striées de rouge et de blanc (ou plutôt de blanc et de rouge ?) ont des courbes douces, des formes arrondies, formant des dômes qui rappellent la forme de celui du Capitole. Ces lignes de couleur blanche, rose et rouge qui courent sur la roche semblent évoquer une composition figurative (ou non ?) avec une harmonie au niveau des couleurs. Au détour du chemin, on se plait à reconnaître un visage familier sculpté dans la pierre, avant de rejoindre le lit de la rivière quasi à sec à cette époque de l’année. On marche dans ces montagnes de couleur rouge, rose-saumonée, orange et blanche et l’envie de s’arrêter à chaque instant pour prendre des photos est plus que tentante !
On ne pouvait décemment pas quitter le lac Powell et ses environs sans refaire un « slide » dans un Slot Canyon et qui plus est dans le plus célèbre d’entre eux: Antelope Canyon. Allez, un petit exercice pratique avant de partir à la découverte d’Antelope Canyon: posez un ruban sur une table et maintenez chaque extrémité bien à plat, puis saisissez le ruban par le milieu et tordez-le d’un quart de tour; vous avez alors une image assez précise du lit d’Antelope Creek. L’arroyo, affluent de la rive sud du Lac Powell, à sec la plus grande partie de l’année, a creusé deux étroits défilés, l’un, Upper Antelope Canyon, surnommé The Crack (« la fissure »), l’autre au nord, Lower Antelope Canyon, surnommé The Corkscrew (« le tire-bouchon »). Upper Antelope Canyon, beaucoup plus visité que le Lower. Upper Antelope Canyon, est certainement le plus fascinant des slots canyons même s’il ne s’agit ni du plus étroit ni du plus long, ni du plus profond. C’est en revanche le seul Slot Canyon dans lequel pénètre en milieu de journée (en été) un mince filet de lumière qui transforme alors l’endroit en une véritable galerie artistique… « De l’ombre ou de la lumière / Lequel des deux nous éclaire ? » (Calogero – L’ombre et la lumière).
Les parois rocheuses sculptées par l’eau aux formes incroyables renvoient alors cette lumière pour dévoiler une superbe palette de couleurs or, orange, rouge, grises et blanches. Malheureusement, la foule est dense et aux heures de pointe, il faut attendre la sortie d’une fournée précédente: très étroit, long d’environ 400 mètres, le passage est vite saturé par les groupes qui vont et viennent. Malgré la désagréable surpopulation de l’endroit, lorsque l’on entre dans le canyon, on remonte le défilé, les yeux sans cesse à la recherche d’une lumière particulière, d’un angle propice, d’un cadrage idéal, sans vraiment savoir ce que donnera la photo. On traverse l’épaisseur de roche aux différents tons, roses, rouges, ocres, bruns, bleu presque noir, où l’on regrette d’aller si vite, d’être si nombreux et de n’avoir pas le temps de trainer.
Tous les Slot Canyon se ressemblent me direz-vous ? Comme dans une émission française de jeux télévisés diffusée de 1976 à 1987 sur une chaîne publique, je dirai, n’en déplaise à Maître Capello « Ni oui, ni Non« . Mais pour vous faire une idée par vous même, je vous propose de découvrir un second slot canyon nommé Canyon X. Situé en terre Navajo, il n’est proposé que par une agence par laquelle vous êtes obligé de passer (le canyon n’est pas répertorié sur les cartes et il s’agit de terres privées). Ici, pas de surpopulation, on prend le temps de se relaxer dans les Upper et Lower canyons. Lower Canyon X est très étroit et les spots de lumière peu nombreux ce qui permet d’avoir une couleur de roche « gris-bleu ». Upper Canyon X est plus large, ce qui signifie que la lumière du jour est omniprésente et les couleurs de roches sont changeantes en fonction de la journée (avec l’inclinaison du soleil): rose, violet, ocre, brun ou bleu.
Changement total de décor… sur la route qui nous ramène vers Phoenix, se cache Wupatki National Monument. C’est l’Arizona comme on se l’imagine plus communément, avec le désert et les ruines amérindiennes. Plusieurs ruines de maisons construites par les indiens Pueblo (en particulier les indiens Sinagua) jalonnent le parc. La légende raconte que les indiens sont venus à Wupatki quand ils ont aperçu ou entendu la dernière éruption des volcans de Sunset Crater Volcano (en 1100). Ils ont ainsi profité des terres fertilisées par les cendres volcaniques pour cultiver maïs et courges. Justement, tout près se trouve Sunset Crater Volcano National Monument, créé en 1930 par le président Herbert Hoover. Sunset Volcano c’est avant tout du sable noir, des coulées de lave au bord d’un ancien cratère volcanique. Le Lava Flow Trail passe au milieu de la lave et permet d’admirer le cône de Sunset Crater qui fait quand même 300 mètres de haut ! Il est toujours impressionnant de déambuler à travers une mer de lave (solidifiée car la dernière éruption date de 1080 !) où la végétation reprend lentement sa place. On découvre les drôles de formes que prend la lave en se solidifiant.
Dernière et ultime étape dans les grands espaces de l’Arizona… Mais pourquoi ai-je une irrésistible envie de fredonner « I’m a poor lonesome cowboy / But it doesn’t bother me / Cause this poor lonesome cowboy / Prefers a horse for company » ? Peut-être parce qu’on se croirait dans le décor de « Western » où à la fin de l’histoire, Lucky Luke, sur fond de soleil couchant, s’éloigne entre deux cactus candélabres; ainsi, grâce à Morris et Goscinny, tout le monde connaît les cactus Saguaros ! Tout autour de Phoenix, ces cactus dont vous avez rêvé depuis tout gamin en feuilletant vos Lucky Luke à la maison, sont là, vous toisant de leur hauteur (plusieurs fois comme vous), aussi nombreux que les arbres dans la forêt. Certains dépassent 15 mètres et pèsent 8 ou 10 tonnes: ils ont 150 ans, plus peut-être, et leur première branche n’a poussé qu’à leurs 75 ans.
C’est dans ce décor « BDtesque » que nous marchons sur les traces des prospecteurs dans Lost Dutchman State Park, situé dans le désert Sonora à 40 miles à l’Est de Phoenix. A défaut de trouver de l’or (de toute façon, inutile d’espérer tenter votre chance, il est interdit d’y prospecter depuis 1984) on profite simplement des magnifiques paysages – toutes sortes de cactus et toujours en toile de fond les Superstition Mountains – et des forêts de cactus Saguaro, particulièrement photogéniques en fin d’après-midi, sous la lumière du soleil descendant… Cactus à droite, cactus à gauche, cactus droit devant… « Le monde entier est un cactus / Il est impossible de s’asseoir / Dans la vie, il y a des cactus / Moi je me pique de le savoir / Aïe ! aïe ! aïe !, ouille ! ouille ! » (Jacques Dutronc – Les cactus). Mais une question me taraude: qui est donc ce Hollandais perdu ? En fait, l’argot (slang) est passé par là. Ce n’est pas un Hollandais mais un Allemand (à l’époque « Dutchman » ne signifiait pas Hollandais mais était un mot d’argot désignant les allemands), Jacob Waltz, qui a donné son nom au parc. Il aurait découvert dans les années 1870 un fabuleux filon au cœur des Superstition Mountains mais n’en a jamais révélé l’emplacement. Après sa mort en 1891 et pendant plus d’une centaine d’années de nombreux prospecteurs ont cherché la mine d’or légendaire mais elle n’a jamais été trouvée… De nombreux ouvrages ont été rédigés, plus ou moins romanesques ou plus ou moins historiques, entretenant le mythe de la mine perdue… Si vous vous sentez l’âme d’un prospecteur et que vous sentez monter en vous une irrésistible fièvre de l’or, vous pourrez satisfaire votre addiction tout en restant sagement assis dans votre canapé à la maison… Vous pensez que je plaisante ? Et bien non, entamez donc une partie avec vos amis, chasseurs de trésors, du jeu de société « The Lost Dutchman« … Quant à nous, il est temps de « slider » vers une nouvelle destination car comme le chante si bien Georges Brassens (reprise des textes de Gustave Nadaud) : « Rester c’est exister ; mais voyager c’est vivre« .
Game over !