Madère, une île de 741 km2 perdue au large des côtes marocaines (à 500 kilomètres de la côte) attire beaucoup de touristes. L’archipel de Madère appartient à la Macaronésie, un ensemble d’îles qui comprend aussi Les Açores, Les Canaries et les îles du Cap Vert. L’archipel de Madère fût découvert en 1418 par les Portugais et il comprend les îles de Porto Santo et de Madère, ainsi que les îles inhabitées Selvagens et Desertas. Visiter l’île de Madeira (« bois » en portugais) c’est découvrir un paradis perdu du Portugal. Cet éden a de nombreux noms comme s’il était difficile de résumer tout ce que cette île a à offrir au voyageur: « l’île aux fleurs », « la perle de l’Atlantique », « le jardin flottant » ou encore « la petite Réunion ». On vient ici parce que tout évoque un paradis terrestre aisément accessible: sur ce bout de terre les fleurs poussent comme l’herbe dans nos prairies et l’île est riche en décors naturels majestueux. Alors sans plus attendre, partons à la découverte des recoins enchantés de ce jardin flottant !
Lorsque l’avion commence sa descente sur l’île de Madère, la première impression est saisissante. On survole d’abord la presqu’île de São Lourenço, un paysage rocheux totalement desséché qui ne correspond pas vraiment au cliché de l’île fleurie toujours verdoyante… Puis on longe la côte Sud où l’on peut apercevoir une concentration de petites maisons blanches qui se mêlent harmonieusement au vert des collines et au bleu de l’océan Atlantique: c’est un véritable kaléidoscope de couleurs. Sise dans une superbe baie entourée de montagnes verdoyantes, sur la côte Sud de l’île, la ville de Funchal (qui signifie fenouil en portugais) est la capitale de l’archipel. Lorsque les navigateurs portugais Tristão Vaz Teixeira, Bartolomeu Perestrelo et João Gonçalves Zarco découvrirent officiellement l’île en 1419, du fenouil sauvage poussait en abondance sur les berges des rivières, à l’emplacement de la ville actuelle. Le site de Funchal est très impressionnant puisque la ville s’adosse littéralement à un amphithéâtre montagneux plongeant dans l’océan. Les constructions s’étendent aujourd’hui depuis la mer sur plus de 600 mètres de dénivelé… Les maisons semblent s’agripper à flanc de collines au milieu d’une végétation abondante, de jardins fleuris et de terrasses cultivées. Il est agréable de se balader sur la marina de Funchal pour prendre l’air en bordure d’océan tout en observant les voiliers, la réplique de la caravelle Santa María de Christophe Colomb ou encore plus loin les bateaux de croisière qui feront escale au port. Ces derniers déverseront leurs flots de touristes, une file de taxis les attendant comme dans tous les ports du monde. Ils iront visiter le jardin botanique pour découvrir l’incroyable richesse florale de l’île, puis ils dépenseront quelques euros en cadeaux souvenir dans les commerces. Ils remonteront alors sur leur immeuble flottant pour une nuit en mer car ils seront demain dans un autre port…
Loin de ce tourisme « éclair », accordons-nous le temps nécessaire pour nous imprégner des lieux et découvrir la culture locale en explorant à pied la ville de Funchal. La vieille ville (« zona velha ») vous plonge dans l’ancien cœur colonial construit autour de la cathédrale Notre-Dame de l’Assomption couramment appelée cathédrale « Sé », mot portugais signifiant « siège ». La « Sé », siège du diocèse catholique de Funchal fut la première cathédrale portugaise d’Outre-Mer. Sa façade de crépi blanc contraste avec le basalte noir et le tuf rouge provenant du Cabo Girão (Cap du Retour en portugais) situé non loin de la capitale (à 17 kilomètres à l’ouest). Ce promontoire rougeâtre domine l’océan Atlantique en un à-pic vertigineux. La hauteur de ces spectaculaires falaises au-dessus de la mer se situe entre 560 et 589 mètres ce qui en fait l’une des falaises les plus hautes d’Europe. Les cultures en terrasse de Fajas de Cabo Girão, un ensemble de parcelles perchées sous la falaise, offrent un étonnant contraste de couleurs. Ces parcelles jouissent de la protection offerte par les falaises, idéale pour la production de vignes et de céréales. Autrefois uniquement joignables par bateau, ces cultures sont désormais accessibles via un téléphérique ouvert en août 2013. Après avoir pris un peu de hauteur, revenons à notre visite de la « zona velha ». En s’éloignant de la cathédrale par la rue Tavira, on débouche sur la place de la mairie (Praça do Município) dallée de pavés blancs et noirs. La place est bordée sur trois côtés par l’ancien collège des jésuites et son église, l’hôtel de ville et l’ancien évêché devenu musée d’Art sacré. L’église du Collège (Igreja do Colégio) est reconnaissable à sa façade blanche percée de fenêtres à encadrement de basalte noir et à son portail gothique du même matériau. La façade comporte le trigramme IHS, emblème de la compagnie de Jésus: I (iota), H (êta) et S (sigma), abréviation du nom grec de Jésus. Au-delà de ses bâtiments historiques, la vieille ville historique est aussi devenue une galerie d’art à ciel ouvert où portes et volets servent de terrain d’expression aux artistes locaux. Difficile de faire escale à Funchal sans visiter (de préférence tôt le matin avant l’ouverture des boutiques et restaurants) le « Street Art » de la rue Santa Maria. Et si vous n’êtes ni amateur de bâtiments historiques, ni fan de « Street Art », il est toujours agréable de déambuler dans les petites ruelles pittoresques de Funchal à la recherche de quelques « azulejos » qui se cachent ici ou là, plus ou moins à l’abri des regards. La ville foisonne de pétales hauts en couleur comme ces magnifiques bougainvilliers, et aussi de belles décorations telles que des guirlandes de papier, des tapis de fleurs et des « Charolas » (boules décoratives de fruits et légumes). La population locale se prépare déjà activement à la « Festa da Flor » (la Fête des Fleurs, véritable hommage au printemps), un somptueux spectacle annuel à la fois visuel et olfactif !
Au cœur du quartier Santa Luzia, se trouve le marché des Laboureurs (mercado dos Lavradores), véritable poumon de la ville, où se vendent les produits traditionnels de l’île. Dans un bâtiment datant des années 1940 le grand patio central à ciel ouvert, pavé d’un damier de pierres noires et blanches, est l’endroit où se trouvent les vendeuses de fleurs en costume traditionnel rouge avec leur drôle de chapeau. Les étals de fleurs exotiques et multicolores sont admirablement soignés. Autour du patio au rez-de-chaussée, les fruits & légumes et les produits locaux se font la part belle. Que de fruits et légumes étonnants: annones, maracuja, cériman dont la chair parfumée évoque le goût de la banane et de l’ananas. L’abondance des fruits tropicaux aux saveurs exotiques se prêtent à la préparation de desserts les plus variés. La mangue, la banane, l’avocat, l’annone et le fruit de la passion, peuvent être consommés en puddings, en flans, en soufflés, en mousses et en glaces. Tiens, si on s’offrait une petite pause pour siroter un « Sumo de Maracujá » (jus de fruits de la passion) … ça vous tente ? Ah, vous préféreriez goûter le célèbre « Poncha » de Madère, élaboré avec de l’alcool de canne à sucre, du miel et du citron. C’est aussi un excellent choix ! Notre soif étanchée, poursuivons la découverte dans un hall à part situé dans la partie basse de l’édifice… C’est ici que se tient le marché aux poissons avec son poisson Star: l’espada ou sabre noir. Ce poisson des profondeurs (on le trouve jusqu’à 1600 mètres en dessous de la surface) filiforme à la peau noire et lisse, évoque une lame. Il a des dents acérées (certaines mesurent 1,5 centimètres) qui peuvent facilement entailler les mains. C’est pour cette raison que ce poisson qui aurait pu tourner dans un reboot des « Dents de la mer » est toujours présenté sous forme de filets dans les restaurants. Si vous n’êtes pas tenté par cette sorte de longue anguille noire servie de toute les façons possibles (en filet frit, grillé, à la banane ou avec des tranches de fruits de la passion etc.), le « bife de atum » ou le « bife de espadarte » (steaks de thon ou d’espadon) simplement grillés et servis avec un filet d’huile d’olive ou le « Lapas Grelhadas » (grillade de patelles) sont aussi un vrai régal pour les papilles gustatives.
Le Jardin Botanique de Madère (Jardim Botânico da Madeira Engenheiro Rui Vieira) situé à Quinta do Bom Sucesso sur les hauteurs de Funchal à une altitude d’environ 300 mètres, offre une vue imprenable sur l’océan et la baie de Funchal. Plus de 2 000 plantes exotiques du monde entier s’épanouissent sur une superficie de 35 000 m2 de jardin. Le climat de Madère se prête à la culture en plein air et quantité de plantes que nous devons acheter et bichonner toute l’année pour assurer leur survie, poussent ici toutes seules. Elles peuvent parfois atteindre des tailles impressionnantes comme ces Cereus peruvianus (Cereus du Pérou ou cactus cierge du Pérou) qui se tendent de plusieurs mètres vers le bleu du ciel. Les fleurs blanches solitaires de ces cactus colonnaires naissent sur une des côtes de la tige et s’ouvrent le plus souvent la nuit. Mais ces jolies tiges côtelées sont aussi garnies d’épines… Gare à l’épine de cactus plantée dans la main: « Qui s’y frotte, s’y pique » ! Mais la dangerosité d’une plante ne se jauge pas seulement à son apparence… Une autre expression est à garder en tête lorsque l’on déambule dans le Jardin Botanique de Madère: « L’habit ne fait pas le moine ». Prenez par exemple cette magnifique Coupe d’or, encore appelée Liane trompette (Solandra maxima) originaire du Mexique, avec ses grandes fleurs très appréciées des jardins tropicaux. Les fleurs de Solandra s’ouvrent le soir (elles restent ensuite ouvertes 24 heures) et dégagent un parfum très fort, suave et captivant rappelant celui du monoï. Pourtant il ne faut pas succomber à son charme envoûtant car le Solandra appartient à la famille des Solanacées tout comme la Belladone, la Morelle noire et le Datura… C’est une plante « narcotico-âcre », c’est-à-dire qu’elle contient une substance vénéneuse qui peut provoquer le narcotisme et des accidents inflammatoires. Ah, ah dire que j’ai failli me faire rouler par cette liane exotique aguicheuse… Ce n’est pas comme ça que je gagnerai ma place au « Paon-théon » des botanistes ! D’accord, j’arrête de faire la roue et je laisse ça aux « Experts du Jardin Botanique de Madère » qui savent déployer leur plumage bleu ou blanc avec panache. D’ailleurs, le panache du paon bleu peut contenir de 100 à 150 plumes et mesurer jusqu’à d’un mètre et demi. Les tons verts et bleus prédominent, avec des zones rondes et noires qui composent les ocelles. Les paons blancs se comportent de la même manière que les autres races de paon bleu et utilisent leurs énormes plumes de la queue de la même façon. Ce paon blanc nous fait penser à une sublime robe de mariée d’une blancheur étincelante. Quelque soit la couleur de son plumage, cet oiseau originaire d’Inde, nous offre un magnifique éventail !
À Madère, des espèces florales provenant de nombreuses régions du monde s’épanouissent, car l’île possède des conditions climatiques propices à la croissance des fleurs tant des régions tropicales que des régions froides. Que vous soyez botaniste, amoureux de la nature ou simple flâneur en herbe, le Jardin Botanique de Madère vous emmène faire le tour du monde d’un royaume végétal… Ici, on apprécie les Cannas pour l’exotisme qu’ils amènent au jardin avec leur floraison estivale aux tons chauds ! Grace à la douceur de son climat, Madère se prête à la culture des orchidées les moins fragiles. Si les floraisons s’échelonnent au fil de l’année, au moment de notre visite, les Cymbidium étaient en fleurs, éblouissantes et élégantes; le Cymbidium est vraiment la star des orchidées ! A l’état sauvage, il pousse en Asie du Sud-Est, sur le versant frais des montagnes, mais aussi dans les savanes. On dénombre une quarantaine de variantes dans une large palette de couleurs… Si les orchidées symbolisent l’amour et la beauté, la couleur de l’orchidée peut changer la signification première de la fleur. Ainsi, les orchidées roses symbolisent la grâce, la joie et le bonheur et peuvent aussi symboliser l’innocence tandis que les orchidées vertes sont censées apporter chance et bénédiction. Elles représentent aussi une bonne santé et la longévité. Juste quelques pas et nous passons du continent asiatique au continent américain… Originaire des régions tropicales d’Amérique Centrale et d’Amérique du Sud, l’Amaryllis (hippeastrum) arbore des tiges creuses fièrement dressées avec des fleurs de six pétales. Si la variété la plus courante reste l’Amaryllis « Red Lion » au rouge profond, on ne dénombre pas moins de 80 variétés aux coloris étonnants: orangé, fuchsia, blanc, uni ou panaché… C’est dans « Les Bucoliques » du poète Virgile que le terme « amaryllis » (du grec « Amarullis » qui signifie « briller ») trouve son origine. La jeune bergère Amaryllis se perça le cœur avec une flèche d’or durant trente jours pour son amour inaccessible avec Alteo. À la trentième journée, son sang se transforma en une magnifique fleur rouge… C’est le botaniste suédois Carl von Linné qui reprit ce nom en 1733 pour baptiser cette ravissante plante, alors peu connue en Europe. Un pas supplémentaire et nous voici en Afrique du Sud où la Crinole blanche porte de larges ombelles de fleurs semblables à des lis blancs gracieusement inclinés… Sa proche voisine (Strelitzia Reginae) arbore quant à elle une forme curieuse, semblable à une tête d’oiseau. L’oiseau de paradis… voilà un nom qui laisse rêveur, non ? Décidément, en déambulant dans le Jardin Botanique de Madère on ressent « le pouvoir des fleurs » chanté par Laurent Voulzy, « On laisserait bien nos cœurs / Au pouvoir des fleurs ».
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Madère est une île formidable ! Pleins de belles randonnées entre pics, levadas et falaises. Et les jardins de Funchal sont une merveille. On a adoré cette île et vos photos nous donnent envie d’y retourner !
Merci Alexandra. C’est vrai l’île aux fleurs, est un paradis pour les amoureux de la nature et de randonnée. Dès la descente de l’avion, Funchal vous accueille avec son somptueux spectacle des fleurs. Difficile de ne pas tomber sous le charme de Madère !