Plantons tout d’abord le décor ! L’Islande, une île flottant tout près du pôle Nord. Elle abrite les entrailles de la terre et le soleil ne s’y couche pas en été… Sillonnée de nombreux cours d’eau, avec ses paysages grandioses et désolés, et avec moins de 3 habitants au kilomètre carré, l’Islande est une terre de feu et de glace où le voyageur se sent insignifiant et humble. Ici, la terre ferme n’est pas toujours sûre: une simple fosse pourrait cacher une marmite du diable, un vert pâturage pourrait se transformer demain en un champ de lave… Du sol jaillissent des geysers et ses cieux s’embrasent en aurores boréales à certaines périodes de l’année. Il y plane une odeur de soufre et d’origine du monde. Terre des extrêmes, autrefois considérée comme la porte de l’Enfer, l’Islande s’est forgé une identité sauvage, mystérieuse et envoûtante…
Cette petite république, où il est possible de prendre un bain à 39°C en plein air grâce à ses fameuses sources d’eau chaude, n’existerait pas sans un grain de folie de la nature. Cette terre sauvage a séduit les Vikings à la fin du 9ème siècle. Ils y ont implanté une civilisation unique entre les champs de fumerolles et les marmites de boue et lui ont également offert une mythologie riche, peuplée de trolls et d’elfes… Pour aider votre esprit à s’imprégnier de cette ambiance mystique, laissez vous bercer par la mélodie de Heimförin (« Going Home« ) et la voix puissante du chanteur islandais Ásgeir Trausti… « Dew that sparkles on the ground / Blue Mountains loom above« … Là, je crois que vous êtes enfin prêts pour commencer votre découverte de l’Islande…
Omniprésente, l’eau est un élément essentiel des paysages islandais: douce ou salée, brûlante ou glacée, trouble ou cristalline, elle est présente sous toutes ses formes et dans tous ses états ! Le tonnerre et le nuage de brume que les innombrables cascades génèrent se voient et s’entendent de loin… Près de Þórsmörk, le mont Eyjarfjall se termine brusquement en falaise abrupte: c’est de là que la cascade Seljalandsfross (« la chute du pot de lait ») tombe d’une hauteur de 40 mètres. Seljalandsfross est la seule chute de l’île derrière laquelle on peut passer sans se mouiller (enfin, presque… c’est sans compter les caprices de Njörd !). Un peu plus loin, entre les glaciers de l’Eyjafjallajökull et du Mýrdalsjökull, on perçoit tout d’abord un lointain murmure qui se transforme très rapidement en un bruit assourdissant au fur et à mesure que se dévoile Skógafoss. La rivière Skógá se transforme à cet endroit en un véritable rideau d’eau de 25 mètres de large et de 60 mètres de haut: voici Skógafoss ! L’après-midi, les gouttelettes d’eau font apparaître un ou deux magnifiques arcs-en-ciel… ce qui la rend encore plus magique ! Mais attention de ne pas déranger dans ses occupations une créature surnaturelle, un elfe, un troll (ou deux ou de Troy !) ou autre sylphe qui veille sur cette cascade… « Hlióðs bið ec allar kindir, meiri oc minni… » (Je demande à tous silence, les grands et les humbles…). Depuis toujours les islandais cohabitent avec le « huldufòlk » le peuple caché: 55% d’entre eux sont convaincus de l’existence des elfes, trolls et des lutins et 5% en auraient même vu ! Sur cette petite île où la nature règne en maître, pas question de les contrarier: les routes contournent les rochers qui les abriteraient et des voyants communiqueraient avec eux pour autoriser la construction des maisons. Il y a même une école des elfes, unique au monde, à Reykjavík, l’Álfaskólinn où vous pourrez décrocher votre diplôme en « études et recherches sur les elfes et autres peuples invisibles ». De l’imaginaire au marketing, il n’y a qu’un pas…
Mais poursuivons notre Histoire d’Ô, en brisant la glace entre nous ! Dans une région couverte de mousse vert fluorescent, s’étend la langue glacière Sólheimajökull, issue de la petite calotte glacière de Mýrdalsjökull. On se sent tout petit face à cette masse de glace gigantesque qui ressemble à un océan déchaîné figé à jamais. Sólheimajökull, « le glacier où vit le soleil » est strié par des lignes de cendres noires déposées par les éruptions des volcans voisins. Il est parcouru par de nombreux petits ruisseaux qui coulent sur ou sous la glace façonnant jour après jour ce glacier. C’est un lent travail de sculpture: la pression de la neige et de la glace crée des brèches et des crevasses dans le glacier; l’eau ruisselante vient ensuite adoucir les formes et polir les parois… « Patience et longueur de temps font plus que force ni rage« … Et il est très difficile de rester de glace devant la beauté d’une arche sculptée avec tant de patience ! Ici, le sol est gorgé d’eau, et les plus distraits peuvent se faire surprendre et revenir avec de la boue noire jusqu’au mollet… on vous aura prévenus, faites un peu attention !
« Noir c’est Noir / Il me reste l’espoir / Oui gris c’est gris / Et je n’veux plus d’ennuis oh oh » (Johnny Hallyday)… La côte sud de l’Islande est constituée de plages de sable… noir (sous un ciel gris, plombé) et de sandurs (sandur est un terme générique désignant un dépôt fluvio-glaciaire). Les vagues, filles d’Aegir (le géant qui règne sur la haute mer avec sa femme Ran et ses 9 filles), sont souvent violentes: elles érodent les rochers et les îles, inondent les plages de sable noir et modèlent inlassablement le littoral. Près de Vik, le cap de Dyrholaey est la pointe la plus méridionale de l’Islande. On y observe un ballet incessant d’oiseaux comme les pétrels fulmars ou les célèbres macareux moines, ces petits clowns dodus à la démarche chaloupée… Le macareux moine porte une tenue sobre qui contraste avec ses pattes palmées d’un orangé soutenu et son bec presque aussi gros que sa tête, orangé également mais strié de jaune. C’est ce gros bec (où on a envie d’ apposer un p’tit bisou québécois) qui lui a valu le surnom de « clown des mers » ou « perroquet« . En se promenant sur la falaise, on a aussi une vue superbe sur la côte, d’un côté les plages infinies de sable noir comme Reynisfjara – de l’autre, une arche rocheuse creusée par la mer, une baie et les pitons rocheux de Reynisdrangar qui émergent de la mer. A Dyrholaey, où les falaises abruptes sont hautes de 120 mètres, un phare a été construit en 1927 pour guider les bateaux par mauvais temps… A quelques kilomètres à l’est se situe le village de Vik, appelé aussi Vik i Myrdal. C’est le lieu le plus pluvieux d’Islande (Sortez vos cirés jaunes et vos bottes de pluie ! )… Dominée par la falaise de Reynisfjall, la plage de Vik est classée parmi les dix plus belles du monde… Bien sûr, cette classification ne se base pas du tout sur la température de l’eau (Brrr !. Attendez que ma langue se dégèle !. Brrr !) mais sur des critères de beauté (comme pour les miss ?). Elle doit sa réputation à son sable noir (Noir c’est Noir..) et à la présence d’aiguilles rocheuses appelées Reynisdrangar (rochers des Trolls). Selon la légende, deux trolls auraient été surpris par les premiers rayons de soleil et transformés en pierre alors qu’ils tentaient d’échouer un bateau trois-mâts sur le rivage (Hé oui, le crime ne paie pas !). Pour les personnes plus terre à terre – qui ne partagent pas ce petit moment de féérie au pays de la fantaisie et des lutins farceurs – il s’agit simplement d’aiguilles de lave érodées par la mer et le vent (assez violent à cet endroit) servant de refuge de à nombreux oiseaux !
Retour sur la route n°1 bordée de fleurs de lupin (qui n’est pas qu’un professeur de défense des Forces du Mal dans Harry Potter) à perte de vue, jusqu’au village de Núpsstadúr. C’est ici qu’habitait le « passeur » au début du 20ème siècle. Connaissant bien le terrain, il aidait les voyageurs à traverser le Skeidararsandur et franchir les rivières glaciaires à cheval avant que des ponts ne soient constuits en 1974 pour achever la route circulaire. Le village comporte plusieurs dépendances au toit d’herbe blotties au pied d’une impressionnante falaise ainsi qu’une minuscule église datant du 17ème siècle cernée de peupliers. Une vieille jeep rouge et jaune rouille à présent à proximité… Cette jeep toute pimpante a été photographiée pour la première fois en 1993. Elle appartenait alors à deux frères, Philippus et Eyjolfur vivant à Núpsstadúr…
Tout proche, le parc national de Skaftafell est un promontoire couvert de végétation situé dans les contreforts du Vatnajokull. Il offre une oasis de verdure inattendue sur la côte sud-est. N’espérez cependant pas voir les grands arbres de nos forêts européennes. Ici, c’est juste des saules, des bouleaux et des peupliers. D’ailleurs, un proverbe islandais raconte que si vous vous perdez dans une forêt islandaise, vous n’avez qu’à vous relever ! Ne me dîtes pas que ce trait d’humour vous laisse de glace ? Dans le parc national de Skaftafell, des torrents dévalent en cascades du Skaftafellsheiði, promontoire rocheux boisé et fleuri en été. La cascade Hundafoss (« cascade des chiens ») était le point de passage à gué où les cavaliers franchissaient jadis le torrent pour accéder aux fermes. Les chiens étaient parfois entraînés par le courant dans le précipice quand le débit d’eau était un peu trop fort d’où le nom de cette chute. Mais la star du parc est sans conteste, Svartifoss (« cascade noire »), qui tombe du haut d’une falaise noire (20 mètres) dans une petite vasque verte cernée d’un mur d’orgues basaltiques. Les colonnes sont très régulières et leur couleur varie du brun au noir profond… tout simplement envoûtant même sans poussière de fée !
Við sjáumst !
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